Simuler un flou de profondeur de champ.

Comment appliquer, avec Photoshop, un flou de profondeur de champ si on ne l’a pas fait (ou pas pu le faire) à la prise de vue ?

Philippe Lasserre, Novembre 2021.

Plan :

  • A- La profondeur de champ, notion,
  • B- Flou simple gaussien,
  • C- Flou profondeur de champ,
  • D- Flou bascule décentrement,
  • E- Flou de diaphragme,
  • F- Neural Filters : flou de profondeur.

 

A- Profondeur de champ.

La profondeur de champ indique la zone sur laquelle les éléments seront nets.

Si sur un appareil APSC, vous avez un objectif de 50mm, que vous ouvrez à f/4 et faites la mise au point  à 4m, vous aurez une profondeur de champ de 1,29 m car les éléments situés entre 3,45 m et 4,75 m seront nets. Ceux avant 3,45 m et après 4,75 m seront flous. Il existe des calculateurs de profondeur de champ : ICI

 

Remarquons qu’on parle de mise au point mais qu’en terme de netteté il faut penser plan (et pas point) : si on fait la mise au point sur un objet, ce sont tous les éléments qui sont à la même distance, c’est à dire ceux qui sont dans ce plan parallèle au plan de l’objectif qui sont nets. Cela veut dire que si vous avez fait votre mise au point à 3 m et avez une profondeur de champ de 20 cm, de 2,90m à 3,10 m par exemple, tous les éléments qui sont entre 2.90 et 3.10 m seront nets, non seulement le sujet mais aussi les éléments à côté du sujet qui sont à égale distance de l’appareil.

Si on floute en post traitement tout ce qui est autour du sujet, ce n’est pas cohérent : en effet certains éléments, l’herbe à côté du sujet par exemple, devraient être nets s’ils sont dans le plan net.

Enfin, le flou de profondeur de champ est progressif : plus on s’éloigne de la zone de netteté plus le flou est important.

Bien que cela soit peu utilisé en peinture, les photographes adorent le flou.

A la prise de vue, c’est franchement le plus simple de créer un flou de profondeur de champ (Pdc), on peut réduire la profondeur de champ et ainsi créer un flou d’arrière-plan et d’avant plan.

  • Tout étant constant par ailleurs ; plus la distance est grande, plus la profondeur de champ est grande,
  • A focale et distance constante,
    • plus l’ouverture est grande (plus le chiffre est petit), plus la profondeur de champ est courte,
    • inversement, plus l’ouverture est petite (plus le chiffre est grand), plus la PdC est importante.
  • A ouverture et distance constante, plus la focale est importante, plus la profondeur de champ est courte.
  • Concernant la taille du capteur, elle n’intervient pas dans la pdc mais : pour obtenir un cadrage identique avec un grand capteur et un petit capteur il faudra modifier la focale ce qui modifie la profondeur de champ : plus le capteur est grand moins on a l’impression qu’on a de profondeur de champ mais c’est le changement de focale qui est en cause. C’est pour cela que les micro capteurs des smartphones donnent des photos toujours nettes car la profondeur de champ est énorme (petit capteur ayant un objectif à très courte distance focale).

Pour créer ce flou à la prise de vue, il faut certaines conditions, avoir un objectif qui ouvre beaucoup (f/1.8…), cela aide. Ces objectifs qui ouvrent beaucoup sont très chères. On peut par ailleurs ne pas avoir utilisé le bon objectif ou avoir fait un mauvais réglage et ne pas avoir le flou désiré.

D’où la question de certains : comment créer un flou de profondeur de champ ?

Comme d’habitude, on ne discute pas le bienfondé de cette demande.

Ce tuto permet de voir ou revoir les différents types de flou que Photoshop permet d’ajouter.

B- Flou gaussien simple.

Certains Photoshopers la font simple : ils appliquent un flou unique à tout l’arrière-plan :

Il faut dupliquer le calque ; sélectionner le sujet (menu Sélection>Sujet, ou utiliser une autre méthode de sélection) puis créer un masque. Ainsi on a le sujet sur le calque supérieur et le fond dessous.

On applique un flou gaussien sur le calque du fond (Menu Filtre>Flou>Flou gaussien). Eventuellement après avoir transformé le calque en calque dynamique pour permettre ultérieurement de modifier l’importance du flou.

Ci-dessus j’ai mis non seulement les sujets mais aussi le premier plan du sol sur le calque supérieur. Ainsi le flou est appliqué au calque du dessous et uniquement sur le fond très éloigné. Comme si la zone nette se situait de 50cm à 5m.

Le plan du fond éloigné est en gros parallèle au capteur ; les bâtiments sont en effet presque à la même distance ; du coup, appliquer un flou identique sur tout le fond c’ est cohérent.

Mais sur la plupart des photos il y a une notion de profondeur et tous les éléments de l’arrière-plan sont chacun à une distance différente. Un flou identique sur tout l’arrière-plan serait très artificiel et ne reflèterait pas la réalité ; les objets situés à même distance que le sujet (le sol, l’herbe…) seraient flous. Et ce flou n’est pas progressif, en plus.

Sur la photo ci-dessous on ne peut pas appliquer un flou d’arrière-plan d’intensité unique. La rampe par exemple doit devenir progressivement floue et cela ne serait pas le cas avec un flou unique.

 

Le flou gaussien est le pire car il supprime le bruit présent dans l’image (ce qui finit pas se voir) ; il est préférable d’utiliser  un quelconque des flous présents dans la galerie des flous ou celui de l’objectif où on peut rajouter  du bruit très facilement. Certains utilisent donc le flou d’objectif sur tout le calque du fond avec la même méthode.

Enfin certains limitent grossièrement le flou autour du sujet avec l’aide d’un masque ou d’un masque ovale, et préservent le sujet. cela fait un peu vignettage de flou pour attirer le regard vers la zone centrale où se trouve le sujet. C’est très utilisé sur certains sites de photos d’animaux. Cette méthode ne donne pas de flou réaliste mais un rendu artificiel que certains peuvent aimer et revendiquer dans un but créatif.

On pourrait à partir d’un calque flou et d’un calque net dessous, appliquer un masque de fusion en mettant du noir pour les zones nettes, du blanc pour les zones floues et un dégradé de gris pour un flou progressif, cela serait plus proche de la réalité. Je n’ai pas vu le résultat de traitement de la sorte car les méthodes ci-dessous permettent de le faire plus simplement.

C- Flou profondeur de champ.

Ce filtre permet de définir des points générateurs de flou qu’on combine entre eux pour créer des mélanges de flous, des dégradés de flou. Malgré son nom ce filtre ne me semble pas très utilisé.

Il faut isoler le sujet sur un calque placé au-dessus, comme on l’a vu ; puis appliquer le flou sur le calque représentant le fond qui est placé dessous. Parfois il est aussi nécessaire d’appliquer un flou sur certaines parties du sujet.

Le filtre Flou de profondeur de champ (menu Filtre>Galerie d’effets de flou>Flou de profondeur de champ) sert à construire un dégradé de flous, en définissant plusieurs points de flou avec des quantités de flou différentes.

Quand on ouvre le filtre il y a un point de flou qui applique un flou sur toute l’image, mais il est possible de déplacer ce point de flou ou d’ajouter un autre point de flou en cliquant sur l’image. En modifiant le curseur « Flou » ou en faisant tourner le cercle autour du point de flou on modifie l’intensité du flou. S’il y a plusieurs points de flou, cliquez sur celui que vous voulez modifier ou déplacer un point bleu apparaitre sur le point sélectionné.

Le résultat final est un effet combiné de tous les points de flou sur l’image.

Ci-dessous j’ai mis en haut un flou assez fort et comme en bas je ne voudrais pas avoir de flou, j’ai ajouté un point de flou avec un effet de flou presque nul, du coup cela fait un flou dont l’intensité augmente de bas en haut.

Ainsi on peut créer des flous cohérents sur l’arrière-plan.

Les méthodes ci-dessous sont probablement plus simples.

D- Filtre bascule décentrement

Ce filtre simuler une image prise avec un objectif avec bascule-décentrement (les appareils qui ont un soufflet entre le corps de l’appareil et l’objectif permettant de décentrer l’objectif ou de le basculer ; c’est utilisé dans les photos d’architecture pour redresser les bâtiments). Ce filtre applique une zone floue en bas puis une zone nette, enfin une zone floue en haut. On va l’utiliser pour simuler un flou de profondeur de champ.

Il faut sélectionner le sujet (ici avec le menu Sélection>Sujet), peaufiner la sélection en passant par le panneau « Sélectionner et masquer » ; sortir de ce panneau sur un calque avec masque ; ainsi le sujet se trouve sur le calque supérieur.

Sur le calque du dessous appliquez le filtre  bascule décentrement  (menu Filtre>Galerie d’effets de flou >Bascule décentrement).

Mettre le point focale (point 1) au niveau du plan ou vous désirez que soit la netteté ; généralement le sol où se trouve le modèle.

Entre les points 2 et 3 il y a la zone de netteté ; puis un flou croissant jusqu’aux pointillés. Les lignes pointillées (point 4 et 5) peuvent être déplacées pour modifier la position du flou. On peut incliner ces lignes si nécessaire.

On modifie l’importance du flou par le curseur flou ou en tournant le cercle blanc autour du point focal.

Ainsi on a une zone de netteté entourée d’un flou progressif en avant et en arrière.

Problème du bavage :

C’est valable pour tous les types de flous quand on a un fond flou et par-dessus un calque avec le sujet.

Sur le fond, si on laisse le sujet, quand on applique un flou et quand le flou est important, le flou fait « baver » des pixels du sujet autour. Cela donne un liseré sombre autour du sujet pas très esthétique.

Pour éviter cela, il faut sur le calque du fond (avant application du flou), sélectionner le sujet (puis agrandir la sélection de quelques pixels), et remplir avec le contenu pris en compte. Cela élimine le sujet sur le fond, du coup l’application du flou sur ce fond ne fera pas baver.

Photo montrant une sculpture absolument magnifique d’Ousmane Saw.

E- Filtre flou de l’objectif.

C’est le top des flous pour simuler une profondeur de champ.

Une table de profondeur (depth map ou z depth) indique où mettre du flou, son intensité et permet de faire des dégradés de flou. Pas besoin d’isoler le sujet sur un calque.

On trouve ce flou ici : Menu Filtres>Flou>Filtre flou de l’objectif. La table indiquant où appliquer le flou peut être un masque ou une couche dans le panneau des couches.

Pour faire un flou correct avec le filtre « flou de l’objectif », il faut donc au préalable réaliser cette « carte de profondeur » (depth map ou z depth) que l’on indique comme source dans le filtre.
  • Le noir correspond à ce qui est net.
  • Le blanc à ce qui est flou.
  • Un dégradé de gris permettra de faire des zones progressivement floues.

Pour avoir notre profondeur de champ, on aura le sujet et le plan du sujet en noir, le reste en gris dégradé jusqu’au blanc

Ma méthode est assez simple : Je crée un masque de fusion et j’utilise ce masque comme carte de profondeur.

Vous avez votre calque unique contenant le sujet et le fond ; ajouter un masque ; il est blanc, on y mettra du noir sur les zones qu’on veut nettes.

Avec un très gros pinceau très doux (bord très progressif) tracez sur le masque, une ligne noire épaisse horizontale au niveau du sol sur la zone qui doit être nette. Puis sur l’image du calque sélectionnez le sujet (menu>Sélection>Sujet). Puis en repassant sur le masque, remplir avec du noir ; désélectionner.

On se retrouve avec un masque ou le sujet et la zone qui doit être nette sont en noir ; on peut peindre sur ce masque en blanc ou noir ; on aurait pu aussi appliquer un dégradé avec l’outil dégradé :

 

Voilà la carte de profondeur est faite. Ce que vous voyez sur votre écran est bizarre : le masque crée des zones transparentes ; mais aucune importance, ce masque ne servira qu’à créer du flou.

Passer par le menu Filtre>Flou>Flou de l’objectif.

Là dans la liste source choisissez « Masque de fusion ». Définir les autres paramètres si nécessaire. 

On peut jouer sur le Diaphragme : si on augmente le nombre de lames cela augmente la finesse du flou. On peut ajouter des reflets spéculaires en modifiant le seuil. On peut ajouter du bruit.

Puis Ok, le flou est appliqué où il faut, cohérent, beau résultat (désactivez le masque si nécessaire, il ne sert plus à rien).

 

 

En complément, voici une vidéo de Emmanuel Correia montrant en détail comment créer une table de profondeur complexe : ICI

Il crée une couche (dans le panneau couches) contenant la carte de profondeur, cela à l’aide d’un calque dégradé et en ajoutant le sujet. S’il y a une couche dans le panneau couches, son nom apparait dans la liste « Source » du filtre ; il suffira de sélectionner cette couche pour qu’elle soit utilisée comme carte de profondeur.

F- Le neural filter, « Flou de profondeur ».

Ce filtre accessible par le menu Filtre>Neural Filters puis Flou de profondeur utilise l’intelligence artificielle. Il est apparu en 2021, en version béta actuellement (nov 2021). Il se charge la première fois qu’on l’utilise. Il faut être connecté à Internet pour qu’il soit accessible.

Dans le panneau il y a une case à cocher « Sujet de la mise au point » :

  • Si elle est cochée, l’IA détecte le sujet.
  • Si elle n’est pas cochée, il faut cliquer sur le point focal (la zone nette).

Ensuite le filtre fait tout seul.

Le filtre crée de la profondeur dans l’environnement d’une image pour faire ressortir un objet de premier plan ou d’arrière-plan. Vous pouvez également ajouter un voile environnemental autour du sujet et ajuster la température de la zone environnante pour la réchauffer ou la refroidir.

 

 

Le neural filter sur cette image très difficile (multiples plans avec plusieurs personnages et des couleurs  peu différenciées) a quand même pas mal travaillé : on voit le fond très flou, les trois premiers personnages sont reconnus ; le dernier personnage visible à droite a été légèrement flouté, le personnage principal est bien net sauf son chapeau. Cette photo n’était quand même pas un cadeau pour cet exercice.

J’ai demandé une sortie sur un calque séparé, aussi, il sera possible avec un masque de remettre de la netteté sur le chapeau.

Un bonus indiqué par Jack Struss :Dans la partie flou de profondeur du filtre neural, il existe une option à cocher une fois son flou réglé : « carte de profondeur de sortie uniquement ». On pourra avec ce calque (une vraie depth map en N&B), faire des corrections manuelles que l’IA a loupées (branches ou feuilles ou rayons de vélo ou lampadaire …) et reprendre ce calque et s’en servir dans le flou de l’objectif comme « source ». Le résultat sera identique mais en mieux !

Bon travail.

Pour marque-pages : Permaliens.

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